Dans notre transformation à l’image de Christ, nous allons découvrir que la vie implique automatiquement un enracinement réciproque. Nous portons la marque de notre prochain avec lequel nous sommes en relation. Et lui, porte la notre.
Si nous voulons une existence stable et saine, nous devons être assurés que les autres sont pour nous. Les premières paroles de l’Écriture annoncent qu’« il n’est pas bon pour l’homme d’être seul », c’est pourquoi Dieu décida de créer « une aide qui sera son vis-à-vis » (Genèse 2.18). Des siècles plus tard, Paul souligne qu’« aucun de nous ne vit pour lui-même et qu’aucun ne meurt pour lui-même » (Romains 14.7). Or, la seule façon pour les hommes d’être vraiment ensemble, c’est en Dieu. Toute autre tentative d’ « être avec » finit par s’incliner devant les besoins primaires de la nature humaine.
Si nous ne possédons pas cette assurance de savoir les autres pour nous, nous avançons meurtris. Sans cette conviction, nos vies seront comme incomplètes jusqu’au jour de notre mort. En fait, la formation spirituelle de nos relations sociales commence dans cette blessure. Un enfant qui n’est pas accueilli comme il se doit dans ce monde sera vraisemblablement incapable de donner et de recevoir de l’amour en développant des relations saines, et ce pour le reste de sa vie. Il sera toujours exclu, même si ce n’est que dans son imagination. Et nous savons tous que, dans ce cas, l’imagination est aussi forte que la réalité.
Les blessures graves peuvent aussi arriver plus tard. Une série d’échecs peut entraîner le rejet ou l’indifférence des parents ou d’autres piliers de l’évolution d’une personne. L’infidélité conjugale, le divorce, les déceptions professionnelles, la rébellion d’un enfant, ou simplement l’incapacité d’ « appartenir » (*) peut entrainer une déconnexion sociale. Or, arrêter de nourrir des relations profondes avec autrui, c’est se laisser mourir de faim dans toutes les autres dimensions de notre vie.
Si un enfant est au contraire entièrement accueilli par ses parents et frères et sœurs dans sa toute petite enfance, l’enracinement aux autres lui permettra de faire face à la plupart des formes de rejet qui peuvent arriver à un être humain. Il apprendra à vivre avec ceux qui sont maladroits avec leurs blagues et ne prendra pas systématiquement la mouche. Il entretiendra des relations solides avec les membres de sa famille tout au long de sa vie et les conservera bien après le décès de ses bien-aimés. Ces derniers lui apporteront un apport constant de repos et de force.
Si d’autres vous ont blessé, la notion d’« enracinement réciproque » peut vous effrayer. Vos blessures ont formé votre autonomie, elles vous ont appris à vous assurer de combler vous-mêmes vos besoins, parce que personne d’autre ne peut vous aider. Toutefois, si vous ne réalisez pas pleinement combien l’amour et la puissance de Dieu peuvent vous envelopper, aucune information, aucun conseil, aucune affection ne pourra prévenir ou guérir vos blessures. Sans Dieu, nous deviendrons de plus en plus endurcis et hermétiques aux relations saines.
Le premier Autre avec lequel nous devons interagir est toujours Dieu, que nous le voulions ou non. Ainsi, tandis que nous prenons des risques et nous aventurons dans des relations (lesquelles font partie intégrante de la formation spirituelle de notre âme), nous ne mettons pas tous nos œufs dans le panier d’un autre – nous les mettons dans le panier de Dieu. Nous nous engageons vis-à-vis de lui, et c’est lui qui nous guide dans notre rapport aux autres. Nous n’attendons pas que telle personne nous nourrisse, nous allons vers Dieu pour être nourris. Il se peut que Dieu utilise cette personne pour nous nourrir, mais, ultimement, tout vient de lui. Le Seigneur est vraiment mon berger, même et surtout dans mes relations.
Entraînement
Et si vous preniez un risque en invitant à manger (ou autre chose du genre) quelqu’un que vous connaissez relativement peu ou avec qui vous n’avez plus interagi depuis longtemps ? Au lieu de penser à ce que vous pourriez recevoir ou à ce qui pourrait se passer, demandez à Dieu qu’il se serve de cette occasion pour vous bénir tous les deux. Si les choses ne se passent pas comme vous l’auriez souhaité (la personne refuse votre invitation, invite un tiers, etc.), soyez assuré que Dieu est à l’œuvre. Priez pour cette personne avant votre rencontre, demandez à Dieu de vous montrer ce que vous devez savoir d’elle pour la bénir. Pendant que vous discutez, profitez du moment tout en implorant silencieusement la bénédiction de votre interlocuteur. Après la rencontre, demandez encore à Dieu de bénir chacun d’entre vous et reconnaissez que personne ne vit pour lui-même ou ne meurt pour lui-même.
(*) Dans son sermon « Le Poids de la gloire », C.S. Lewis parle du « cercle intérieur » et décrit ce désir d’appartenance comme « l’un des propulseurs permanents de l’action humaine » (traduction personnelle).
E. Parodi | Traduction/adaptation/contextualisation d’après Renovation of the Heart in Daily Practice: Experiments in Spiritual Transformation, par Dallas Willard et Jan Johnson, (Colorado Springs, CO: NavPress, 2006). Y.Parodi | Adaptations